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Baby blues ( Carole Fréchette) [1988] (Éditions Les Herbes rouges 2e édition, Montréal: 2016) 10.95$
Première lecture Ce texte a été présenté en lecture publique par le CEAD, le 27 février 1988. Création Théâtre d'Aujourd'hui, 15 mars 1991 Nombre de personnages 5 Personnage(s), 5 Femme(s), 5 Acteur(s) | |
Résumé Dans une maison ordinaire d'une ville moyenne, vivent une jeune
femme pâle nommée Alice et un bébé rose nommé Amélie. La grande a presque trente ans, la petite à peine quarante jours... Cette
nuit-là, Alice ne dort pas; cela fait maintenant quarante jours
et quarante nuits qu'elle n'a pas dormi. Dans la torpeur de
l'insomnie, surviennent les visiteuses de la nuit : sa mère, toujours
inquiète, sa sœur aînée, qui ne doute jamais, sa tante des « États »,
qui a fait des choses défendues, et sa grand-mère, naïve et délicate
comme une jeune fille. À travers ces femmes de sa lignée, Alice
cherche à recoller les morceaux de sa propre existence, marquée par le
doute et le tourment.
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- Caractéristiques des personnages: ALICE : Presque 30 ans. Elle vient de donner naissance à son premier enfant : une fille. Elle n'a pas dormi depuis l'accouchement; pas une seule minute de sommeil depuis quarante jours... Alice est chanteuse. Elle a étudié la musique au Conservatoire qu'elle a quitté avant terme afin de composer sa musique. Mais elle ne l'a jamais fait. Elle n'est pas du genre à chercher les affrontements. Mais, cette nuit, elle n'est pas dans son état normal. Elle est extraordinairement éveillée. Elle a des yeux doux, mais n'est pas si douce.
AGATHE : 31 ans. Sœur aînée d'Alice. Femme de carrière intelligente et déterminée. Sa photo paraît régulièrement dans les journaux; toujours vêtue d'un tailleur classique et d'un chemisier à cravate, elle fixe l'objectif avec assurance. Ses cheveux courts sont impeccablement coiffées.
ARMANDE : Presque 60 ans. Mère d'Alice et d'Agathe. Armande est une femme comme on en voit des centaines, rue Sainte-Catherine, les après-midi de semaine : très bien mise, modestement mais avec goût. Elle a une petite voix intérieure qui ne s'arrête jamais. Elle vit avec cette petite voix depuis des années sans plus même remarquer sa présence. Armande ne touche plus ses enfants, elle qui a tant aimé les caresser. Elle a un corps fermé, caché sous des vêtements sages.
ADÈLE : 51 ans. Sœur d'Armande. Sous des dehors de bourgeoise parvenue, c'est elle la plus sauvage de toutes. Elle a les cheveux teints et porte des tas de bijoux d'un goût douteux. Son corps est jeune, mais son visage ravagé. Elle chante bien et connaît par coeur le palmarès des années 1950. Elle apporte la boisson qui délie la langue et ouvre le corps.
ANTOINETTE : 84 ans. Mère d'Armande et d'Adèle. Depuis longtemps, elle vit dans un hôpital pour vieillards. Elle confond le passé et le présent, et ne reconnaît plus ses enfants. Elle a déjà eu, comme Armande, une petite voix intérieure, mais la voix s'est tue, il y a quelques années. Le mécanisme a lâché. Elle est petite et fragile. Son corps est ouvert, libéré des contraintes. Sous sa peau de vieille femme, c'est un corps d'adolescente qui vibre.
AMÉLIE : 40 jours. Fille d'Alice. On n'entendra que ses pleurs.
- Autres médiums: Radio de Radio-Canada, émission &IThéâtre du Lundi&i,
16 mai 1988.
Extrait « ARMANDE : Une nuit, je dormais pas. Je pensais à Émile, peut-être. Je me demandais ce qu'il y avait dans sa tête, s'il était heureux, aussi heureux qu'il le disait, s'il pouvait lire dans mes pensées après toutes les nuits passées à côté de moi, s'il savait que je… que j'étais faite pour autre chose, pour creuser, déterrer les crânes en morceaux… Ou peut-être que je pensais à Adèle. Je me demandais comment la retenir, comment la sauver, comment l'empêcher de s'étourdir comme ça… Ou bien je pensais à Paul Newman, à ses beaux yeux bleus glacés. Je me demandais s'il pourrait voir à travers moi avec ces yeux-là. (Un temps.) Je me suis levée pour marcher un peu. J'ai entendu du bruit. Ça venait de la chambre des enfants. Je me suis approchée. La porte était entrouverte. J'ai regardé. J'ai vu la petite Alice avec sa poupée Catherine, assise bien droite dans son lit, les yeux grands ouverts, à trois heures du matin. J'ai regardé sans bouger; il y avait quelque chose dans ses yeux : une inquiétude. J'ai regardé. J'ai regardé. J'ai pensé : " Alice, Alice, tu es comme moi. Je voulais pas. Je voulais que tu sois différente, que tu cries, que tu t'envoles, que tu ries aux éclats. Tu es comme moi. Pourquoi? " J'aurais voulu m'asseoir à côté d'elle, sans parler, continuer la nuit comme ça, les yeux ouverts, nos insomnies côte à côte. Je suis entrée, j'ai dit : " Il faut dormir, Alice. Tout va bien. " » À propos de(s) l'auteur(s)
(Photo : Claude Dolbec)
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D’abord formée comme comédienne à l’École Nationale de Théâtre du Canada, Carole Fréchette se consacre à l’écriture depuis plus de trente ans. Elle est l’autrice d’une vingtaine de pièces et de deux romans pour adolescents. Ses textes, traduits en ...
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